Jean Pierre Raynaud

Résumé

« Le fil sur lequel je marche et sur lequel je vis me demande une attention constante et m'interdit de vivre ce que l'on vit dans une vie normale. »

L'art de Jean-Pierre Raynaud est un extrémisme. Fasciné par les démarches touchant les limites de l'art (Malévitch, Klein), il devient difficile de distinguer ce qui chez lui relève de l'art ou de la vie. Pourtant cet extrémisme est un extrémisme du milieu. En effet, Raynaud s'est toujours refusé à choisir entre ces deux options qui partagent le monde : sensibilité et exigence, douceur et sévérité, romantisme et ascétisme… Sa position s'avère en conséquence précaire et dangereuse.

Il lui plaît de se situer sur le fil qui à tout moment peut faire basculer d'un côté comme de l'autre. C'est dire que sa position, bien que centriste, n'est pas tiède et demande une vigilance de tous les instants. Ce paradoxe traverse son art comme sa vie. Ainsi, il vit dans un isolement radical sans pour autant faire un trait sur le monde (la démarche de Raynaud n'est pas un ascétisme) : passionné par la question de la liberté, il se donne à lui-même les pires contraintes (la démarche de Raynaud n'est pas un mysticisme).

Génératrice d'énergie, cette tension le pousse à vivre et à produire. En effet, bien qu'extrémiste, cette démarche n'implique pas le suicide, se distinguant par là de celles de Van Gogh ou d'Ad Reinhardt.
En 1974, Raynaud inaugure sa série de carrelage (79 x 63cm) numérotée 0 qui représente pour lui le « point zéro de sa sensibilité», l'abolition de l'œuvre en même temps que sa sublimation, la manifestation simultanée d'une présence et d'une absence.